Qui est Fred le Chevallier ?
Je n’aime pas trop parler de moi. Ce sont mes dessins qui me racontent.
Fred le Chevalier est le nom de plume, j’ai l’ai choisi pour mes côtés Don Quichotte, Alexandre Dumas…
Je trouvais ce nom amusant clinquant, joli et rigolo, noble et ridicule…
Pour la petite histoire, j’ai gardé un enfant et le jeu était d’inventer des noms ridicules pour l’entourage. Je cherchais un nom un peu prestigieux pour moi « Fred le Chevallier » est arrivé comme ça. Le surnom a été repris par mes potes et le côté « veuve et l’orphelin » est resté.
Le dessin est devenu central dans ma vie, et finalement le nom de Fred le Chevalier me correspond mieux que mon nom d’Etat civil.

Est-ce l’artiste qui déteint sur les dessins ou inversement ?
« Artiste » c’est un mot lourd, pesant voire prétentieux, je fais juste des dessins.
Mais oui je réfléchis tout le temps à mes activités de dessin et de collage. Ca a changé ma vie.
C’est une aventure qui prend de la place dans ma vie et qui me permet de faire de chouettes rencontres. Le dessin a bien déteint sur moi.
Au début Fred le Chevallier n’était qu’un petit aspect de moi, maintenant c’est l’essentiel.

Quand est-ce que tout a commencé ?
Comme tout le monde, je dessinais beaucoup enfant, comme tout le monde j’ai arrêté. Mais j’ai recommencé il y a 6 ans avec la même technique qu’à l’enfance.
Le déclic est arrivé dans une période où j’avais envie de revenir vers des choses agréables, envie de me faire du bien…
Et puis j’ai rencontré Béatrice Myself de tours,une personne qui dessinait de manière très poétique sans grande technique, c’était très touchant. Je me suis dit que moi aussi je pouvais le faire.
 Beatrice Myself
 Beatrice myself
Et j’ai commencé à entrer dans la démarche de partage de mes dessins, d’abord avec MySpace, puis en collant depuis 2 ans et demi. Au début, je ne collais pas beaucoup, mais il y a eu une belle évolution, j’utilise de plus en plus de grands formats qui s’imposent davantage dans la rue.
Comment es-tu passé du papier au mur ?
C’était logique pour moi.
Coller me permet de rencontrer des gens sans passer par des galeries ou des musées.
Cela s’inscrit dans une démarche de partage, je donnais déjà mes dessins à qui les aimait, coller permet de les partager avec plus de gens encore.

Ca a commencé quand j’ai imprimé sur des tee shirt pour que mes dessins puissent voyager, et ça continue avec les collages. Au début, je ne collais que la nuit car je pensais qu’il fallait être discret. En fait c’est plus détendu de coller la journée, tu es finalement plus transparent et les remarques sont positives.
Comment choisis-tu tes murs ?
C’est une démarche de ballade au hasard, je colle sur les murs que j’aime bien. J’ai quelques lieux habituels où je reviens car je sais que les gens vont voir ces dessins. J’ai l’impression de leur parler…

En général je cherche des murs abîmés et sales là où mes collages ne vont pas agresser. L’idéal est un mur sale et lisse avec une couleur brique.
Collages sans signature, avec textes, avec questions… y-a-t’il une logique dans l’évolution de tes dessins ?
Au début je ne signais pas mes dessins, j’aimais l’idée de l’anonymat et visuellement cela me paraissait alourdissant d’ajouter une signature. Depuis que je les signe, ça a augmenté mes contacts avec les gens, les retours.

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 petite phrase sous collage
Ma période « question » c’est pour permettre un échange avec le passant qui va s’arrêter et parfois essayer d’y répondre. De plus en plus souvent je mets des petites phrases, comme des maximes.
 « Dans le bois de mon enfance ne vivait aucun loup, il m’enveloppait à nouveau d’une ombre frêle et fraiche. C’était un bois de ville, un symbole planté d’arbres, de terres peuplées de quelques animaux, de mes monstres et du silence où tout imaginer. Dans le bois de mon enfance ne vivait aucun loup, ils restaient dehors, nous y étions tapis, ils défilaient. » Fred le Chevalier
Je suis dans une phase de « boulimie de collage » : j’ai besoin de dessiner vite pour avoir toujours de nouveaux dessins. Cela permet de faire un roulement entre anciens dessins et nouveaux.
Tu vis de ton art ?
Absolument pas, j’ai un emploi à temps plein. Le dessin c’est d’abord un budget, mais un budget « passion ». Une journée où je colle est une journée de plaisir. C’est dur à évaluer mais depuis peu cela me rapporte un peu d’argent. Avant ça m’en coûtait beaucoup actuellement c’est équilibré.
 Produits dérivés by Fred le Chevalier
Ce rapport à l’argent est très nouveau pour moi.Le fait que mes dessins puissent plaire est une surprise. J’ai des commandes, des demandes et ça aussi c’est tout nouveau. Je ne me disais pas que je faisais de l’art, avec des objectifs, une idée de carrière . Le fait de faire des expos et le buzz autour de mon nom me plaisent même si c’est assez déstabilisant.
Mon rêve ce n’est pas d’être riche, c’est de dessiner toute la journée.
 Encre, carnets, papier, stylo… Expo !
Comment gères-tu entre ta passion et ton travail ?
Mon boulot me permet de rester dans la passion, de n’avoir besoin de rien. En même temps c’est frustrant car je dois refuser des projets qui m’intéressent par manque de temps et j’utiliserai volontiers mes trente cinq heures de salariat à dessiner bien sur.
Ta passion est assez récente à l’échelle d’une vie, comment l’expliques-tu ?
C’est un parcours de vie, j’aurai du mal à l’expliquer ou du moins le synthétiser. J’ai effectivement commencé tard avec l’envie de revenir à des passions inachevées.

Cela aurait pu être autrement, pratiquer plus jeune m’aurais amené ailleurs sans doute mais j’aime bien l’idée d’être vieux et débutant, cette démarche est pleine de fraîcheur !
 Photo by Martius Denius
Je suis amoureux de ce « truc », mes dessins sont pleins d’émotions, de bouts de moi, la plus belle part.
Quand je les colle, je les embrasse, je les caresse… Moi qui ne suis pas un manuel, ce côté tactile me plaît.
Et tes dessins ne se jalousent pas entre eux ?
Non (rires) je recolle aussi les vieux dessins alors ça va…
Comment te positionnes-tu au sein du mouvement « street art » ?
Je ne connais pas vraiment le milieu du street art, quelques noms célèbres me parlent comme Jérôme MENAGIER et ses silhouettes ou Ernest Pignon Ernest dont j’ai admiré le travail dès l’enfance
Je me sens dedans et à l’extérieur en même temps de ce mouvement. Dedans car j’ai la même démarche, l’envie commune de faire vivre mes dessins en les amenant vers les gens, de pratiquer un art désacralisé. En même temps je suis en dehors du mouvement car beaucoup viennent du graff ou de la peinture. Ils ont des références qui ne sont pas du tout les miennes.
Au final nous avons tous des points communs, un respect mutuel. C’est la même fraîcheur et la même passion qui s’exprime et même si les créations ne se ressemblent pas on a tous les yeux qui pétillent devant.
Des envies de collaboration ?
Certains artistes me donnent envie d’aller vers eux, que ce soit des gens proches ou d’autres dont j’aime le travail et trouve sympathiques Mais comme je n’aime pas les contraintes, il faut vraiment que la collaboration soit sur des bases simples.
Je reste plutôt un animal solitaire.

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